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dimanche 17 janvier 2016

Ma rencontre avec les dames de la cantine...

 Avant-propos

Patrick et moi ainsi que tous ceux qui nous ont accompagné dans nos voyages au Togo avons été particulièrement touchés lorsque nous avons appris les derniers attentats à Ouagadougou. Nous atterrissons en effet au Burkina avant de nous rendre en voiture dans la Région des Savanes. Nous avons déjà dormi à l'hôtel Splendid et le café Cappuccino est l'un de nos rendez-vous favoris avant de rentrer en France. Cette horreur a rattrapé le Burkina-Faso alors qu'il avait géré de façon exemplaire les troubles de fin d'année et les élections présidentielles, montrant ainsi que le pays était en bonne voie pour devenir une vraie démocratie.
Cette violence peut frapper partout et à tout moment et nos voyages n'en deviennent pas pour autant plus dangereux. Nous continuerons donc comme par le passé notre action. 


La cantine de Nagou


Le chaudron et sa gigantesque spatule en bois sur le foyer trois pierres traditionnel de l’Afrique de l'Ouest

Dans un billet du 17 décembre 2014, nous vous parlions de la création de la cantine de Nagou. Pour mémoire, les bâtiments ont été construits au printemps 2014 et la cantine était opérationnelle à la rentrée de septembre. L'année scolaire 2015-2016 est donc sa deuxième année de fonctionnement. Et ... c'est un succès : à la rentrée dernière, les trois autres villages nous en ont demandé une pour leur école.

Une des mamans prend de l'eau chaude pour préparer la sauce. Le foyer utilisé cette fois-ci est une sorte de foyer amélioré qui a une rentabilité supérieure au traditionnel foyer trois pierres

Pourquoi une cantine ?

Le réponse parait évidente mais la création d'une cantine est vertueuse à plusieurs titres :
  • elle lutte contre la malnutrition,
  • elle permet de donner des rudiments d'hygiène aux enfants,
  • elle aide à lutter contre l'absentéisme scolaire : certaines que leur enfant bénéficiera d'un repas, les mamans l'envoient à l'école et celui-ci y reste donc l'après-midi,
  • elle donne un statut aux femmes du village qui forment les brigades de travail,
  • elle introduit la notion de collectivité et mobilise le village autour d'un principe.

Préparation de la « pâte » avec les femmes, un moment de partage malgré la barrière de la langue. La pâte est une bouillie très épaisse. Le problème est que la quantité à cuire est énorme !

Lors de notre dernier voyage, il y une dizaine de jours, j'ai participé à la préparation du repas avec les femmes. Je voulais partager leur quotidien afin mieux comprendre leurs difficultés. Pas très facile de communiquer car mon Moba, dialecte local,  est rudimentaire. Avec des gestes, nous nous en sommes sorties et mes talents culinaires ont fait le reste. Mais au bout du compte, ce sont mes biceps qui n'ont pas été à la hauteur !

La pâte devient de plus en plus épaisse, de plus en plus lourde à tourner. Je rends mon tablier, épuisée. les femmes se moquent gentiment de moi

Le fonctionnement de la cantine 

Les mamans se sont organisées en brigade de 32 femmes travaillant par équipe de 8. Il leur faut sortir 300 repas pour les enfants. Et bien sûr elles partent de la matière brute, rien de préparé d'avance, pas de surgelés ou de préparations à moitié cuisinées. Or ces femmes le matin doivent déjà s'occuper de leurs enfants, aller chercher l'eau pour les besoins de la famille, collecter le bois pour le feu... Lorsque ces premières tâches sont terminées, elles viennent faire leur travail pour la cantine. Préparer les repas des enfants est réellement une tâche supplémentaire très fatigante. Précisons que ce travail pour la collectivité n'est pas rémunéré.


On remplit les assiettes et on les met à refroidir

Exemple de menu pour la semaine 

Lundi : pâte de maïs + sauce de saison (gombo, épinard)
Mardi : riz + sauce tomate ou sauce arachide
Jeudi : haricots en grain + gari (semoule de manioc)
Vendredi : pâte + sauce de saison

Les rations des assiettes sont démoulées, mises dans des bassines, apportées dans les classes et redistribuées dans les assiettes avec la sauce du jour.

La cantine n'utilise pas de nourriture importée et les quantités utilisées sont mesurées de façon très précises. En théorie il est donc facile de gérer les stocks. En pratique il faut quelqu'un qui sache compter et se projeter dans l'avenir. La cantine étant sous la responsabilité de l'école, le directeur de celui-ci a accepté de la superviser.


Distribution des repas aux enfants : la maternelle

 

 

Réunion avec les dames de la cantine

 Les femmes font un travail difficile et fatigant et pourtant, lors de la réunion que j’aurai par la suite avec elles, pas une ne se plaindra de la pénibilité de ce travail. Non, elles me diront juste que la queue est bien longue au forage pour aller chercher les litres et les litres d'eau que nécessite la cuisine. 

 Ce sera l'occasion d’introduire la notion de collectivité. En effet les femmes, travaillant pour les enfants de la communauté, doivent être prioritaires pour puiser de l'eau. C'est au directeur de l'école de faire passer cette notion. Je me contente de leur suggérer mais on en parlera au directeur.
Ah ! oui, elles me diront aussi que ce travail est salissant. Le savon coûte cher alors nous allons essayer de leur fournir des blouses. En plus du côté pratique du vêtement, le port de la blouse participera à la reconnaissance du rôle de ces femmes en leur donnant un « statut » social dans le village.


Ci-contre, Martine Sinanja, notre contact au Rotary club de Dapaong, est là pour m'aider à mener la réunion et faire l'interprète. Martine est d'une grande aide pour tout ce qui concerne l'éducation et la condition féminine en général. C'est elle qui a créé les collège et lycée privés de Dapaong qui a maintenant plus de 700 élèves. C'est une femme de tête et une femme de cœur pour laquelle j'ai beaucoup de respect et d'admiration.



 

Le financement de la cantine de Nagou

Mais qui finance et comment faire que cette cantine devienne pérenne ? Les expériences passées ont montré que lorsque les ONG partent, les cantines disparaissent. Comment faire alors pour que notre cantine perdure et comment l'autofinancer ? 
On vous en parle dans le prochain billet. On verra comment un village qui n'a rien, avec un judicieux coup de pousse, peut réussir à fiancer son propre développement.



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